Avec 31,47% des suffrages exprimés lors des élections européennes, le Rassemblement national a remporté hier un succès inédit, améliorant de près de 9 points son score de 2019. Il suffit de regarder la carte des résultats pour constater que la liste conduite par Jordan Bardella est arrivée en tête presque partout. En l'occurrence, dans 32 613 communes sur 35 015, soit dans 93% des communes de France, selon les résultats publiés par le ministère de l'Intérieur.
Dans certaines zones rurales, le Rassemblement national obtient même des scores qui tournent autour de la moitié des voix. C'est notamment le cas dans l'Aisne, où 50,64% des électeurs qui se sont déplacés ont glissé un bulletin RN dans l'urne, et où la liste de Jordan Bardella fait son plus gros score. Le parti obtient aussi des scores particulièrement élevés enHaute-Marne (47,13%), enHaute-Saône (45,8%) ou encore dans laMeuse (46,03%), par exemple.
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Les résultats des élections européennes par commune (© AFP)
Le Rassemblement national réalise également des scores importants dans des zones qui ne lui étaient pas acquises jusqu'alors. En Bretagne, notamment, où l'ensemble des départements avaient privilégié Emmanuel Macron à Marine Le Pen, dans le duel pour la présidentielle de 2022, ainsi que la liste de la majorité lors des dernières européennes. Cette fois, le RN l'emporte dans les quatre départements de la région, dépassant même les 28 % dans les Côtes-d'Armor et le Morbihan.
En périphérie de grandes agglomérations, en grande couronne autour de Paris, dans plusieurs arrondissem*nts de Marseille, autour de Lyon... Le même scénario s'est répété dans toute la France. Subsistent encore quelques poches où le RN n'a pas encore complètement percé : aucœur des grandes villes et autour de Rennes, Nantes, ouen Polynésie française. Certains départements, historiquement à gauche, comme l'Ariège, sont encore mouchetés de rose et de rouge, mais le RN y arrive globalement largement en tête, loin devant la liste PS - Place publique de Raphaël Glucksmann(32,52% contre 17,42%).
A Paris, c'est la liste de Raphaël Glucksmann qui arrive en tête, devant celle de la majorité présidentielle menée par Valérie Hayer. Cette dernière n'arrive en tête que dans un seul département en France hexagonale, les Hauts-de-Seine. La liste de Manon Aubry (La France insoumise) arrive pour sa part première à Strasbourg, Grenoble, et dans de nombreuses populaires comme à Vénissieux, Vaulx-en-Velin et Villeurbanne (Rhône), ainsi que dans la majorité des communes de Seine-Saint-Denis.
Quels enseignements en vue des législatives ?
A ce stade, il serait cependant prématuré de tirer des conséquences définitives du résultat des européennes en vue des élections législatives anticipées qui se tiendront les 30 juin et 7 juillet prochains, à la suite de la décision d'Emmanuel Macron de dissoudre l'Assemblée nationale. D'abord parce que les modes de scrutin sont différents : pour les européennes, il s'agit d'un scrutin de liste à la proportionnelle, tandis que pour les législatives, il s'agit d'un scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Ensuite parce qu'au-delà des dynamiques nationales, les législatives sont aussi 577 élections différentes, avec des équations personnelles et locales.
Enfin, parce qu'il est encore difficile de prévoir quel sera l'impact de ces résultats sur les abstentionnistes. Le second tour des législatives de 2022 avait été marqué par une abstention de 53,8 % ; ce dimanche, elle était de 48,17 %. Ce qui implique des réserves de voix importantes, et des électeurs peut-être plus à même d'être remobilisés par les enjeux des législatives à venir.
Par ailleurs, la stratégie des différentes familles politiques devrait également influer sur le résultat des prochaines élections. Reste à voir quelle sera l'impact de la main tendue de la majorité présidentielleauxélus sortants qui font partie du "champ républicain" - à savoir dans l'esprit de ses dirigeants, hors RN et LFI -, et contre lesquels il ne serait pas présenté de candidats ; où mèneront les discussions entres les partis de gauche, déjà en pourparlers en vue de ressusciter l'esprit de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) sous la forme d'un "nouveau front populaire" ; quel choix feront Les Républicains, alors que leur président, Eric Ciotti, a refusé dimanche toute idée de coalition avec la majorité présidentielle sortante.
Marine Le Penl'a, pour sa part, dit et répété dès hier : le Rassemblement national est "prêt" à gouverner le pays. En outre, si Sébastien Chenu a d'abord fermé la porte à un accord avec Reconquête, une rencontre a eu lieu ce lundi 10 juin entre Jordan Bardella et Marion Maréchal,la tête de liste du parti fondé par Eric Zemmour. Sans qu'un décision soit prise à ce stade. La campagne est lancée. Et elle ne durera que trois semaines.
